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Actualités - Page 7

  • MANDELA : PIERRE LAURENT A RAISON !

    Le secrétaire général du Parti communiste rappelle "qu'avant que le mouvement contre l'apartheid entraine tout le monde dans son sillage, il y a eu des années de solitude. 27 ans de prison, dont les 15 premières se sont faites dans l'indifférence générale". Vrai ou faux ? Réponse ici.

    Pierre Laurent le 30 octobre 2013 © Maxppp

    Vrai

    En Afrique du Sud, le nom de Mandela n'est pas prononcé dans les médias. Pierre Haski, actuel patron de Rue89 était correspondant en Afrique-du-Sud pour l'AFP au moment des émeutes de Soweto en 1976. "Il faut savoir qu'à l'époque, Nelson Mandela était déjà en prison depuis 15 ans. Son visage et ses paroles ne pouvait plus être cités dans la presse. Et tous les jeunes ne l'avaient jamais connu", affirme le journaliste. C'est Winnie Mandela qui se chargera de faire vivre son époux politiquement pendant les années de prison.

    Mandela peu connu en France

    L'indifférence est aussi mondiale pendant très longtemps. En France, par exemple. En 1984, un sondage Ifop pour l'Humanité dimanche révèle que 68% des Français n'ont jamais entendu parler de Mandela. La longue indifférence sur son sort a une explication politique. En pleine guerre froide, l'ANC de Mandela est sous influence communiste.

    Guerre froide

    Antoine Glaser, spécialiste de l'Afrique explique que "toute personne qui luttait contre l'apartheid ou le développement séparé en Afrique du Sud était considérée comme un communiste". Le monde occidental s'accommodait du développement séparé avec les blancs. "Au moins, eux, ils préservent les matières premières stratégiques [...] comme l'uranium et l'or", ajoute Antoine Glaser, qui rappelle la crainte de les voir tomber "aux mains des soviétiques. Il n'était absolument pas question de soutenir l'ANC pour les occidentaux", conclut le spécialiste de l'Afrique.

    Business

    La France et la Grande-Bretagne font partie de ces occidentaux qui se souciaient peu de Mandela et de son combat.
    Le pouvoir britannique restera longtemps favorable à l'apartheid. En 1987, soit trois avant la libération de Mandela, le Premier ministre Margaret Thatcher s'oppose à des sanctions contre l'Afrique du Sud et considère l'ANC comme "terroriste".
    Quand à la France, elle a vendu des armes à l'Afrique du Sud. Elle a aussi construit là-bas la seule centrale nucléaire du continent africain, alors que le régime de Pretoria était condamné par une partie de la communauté internationale.

    Publié par France Info

  • CHILI : 1973 - 2013 : 40 ANS DÉJÀ ! SPECIAL ANNIVERSAIRE !

    chili_allende_pinochet_18b_hr_fr.jpgAu matin du 11 septembre 1973, le palais présidentiel de la Moneda est cerné et bombardé. Le président socialiste Allende annonce à la radio :

    «Qu’ils le sachent, qu’ils l’entendent, qu’ils le gravent en profondeur : je ne laisserai la Moneda qu’à la fin du mandat que m’a donné le peuple, je défendrai cette révolution chilienne et je défendrai le gouvernement car c’est le mandat que le peuple m’a confié. Il n’y a pas d’alternative. Ce n’est qu’en nous criblant de balles qu’ils pourront empêcher la volonté qui est celle de faire accomplir le programme du peuple.

    Si on m’assassine, le peuple suivra sa route, suivra son chemin même si les choses seront plus difficiles et plus violentes. Et ce sera une leçon objective très claire pour la majorité de ces gens que rien n’arrête. J’avais tenu compte de cette éventualité, je ne leur offre pas la facilité. Le progrès social ne va pas disparaître parce que disparaît un de leur dirigeants. Il pourra demeurer, se prolonger. Mais on ne peux le renfermer ni le mettre à genoux.».

    chili1973.jpgCe 11 septembre 1973, les troupes du général Augusto Pinochet assiègent le palais présidentiel de la Moneda, à Santiago. La junte, dirigée par les commandants des armées chiliennes, demande la démission du président Salvador Allende.

    Vers 9 h 30, Allende prononce un dernier discours radiodiffusé. Quelques minutes plus tard, les troupes commencent à tirer sur le palais, puis à le bombarder. Dans l'après-midi, les 50 personnes qui se trouvaient aux côtés du président se rendent aux militaires. Poussé au désespoir, Salvador Allende se suicide.

    Le coup d’état militaire, organisé avec l’aide des Etats-Unis, inaugurera une dictature avec une répression politique massive.

    2 279 morts et disparus ont été recensés dont 641 morts « dans des conditions non élucidées » et 3 197 « détenus disparus ».

    Près de 150 000 personnes ont été emprisonnées pour des motifs politiques.

    Il y a eu des centaines de milliers d’exilés politiques.

    Le réseau des blogs E-Mosaïque à l’occasion de ce triste anniversaire publiera une dizaine d’articles pendant les mois d’août et Septembre pour célébrer cet évènement marquant de la tragédie humaine.


    Coup d'Etat Chili 1973 par sybelium

  • Bal d’hypocrites pour Mandela : quand l’Occident soutenait Pretoria

    nelson-mandela-a-ete-enferme-durant-27-ans.jpgL’avalanche d’hommages déjà prêts à Nelson Mandela est certes méritée par la personnalité, le sacrifice, et la vie du grand leader sud-africain. Mais elle pourrait laisser croire que tout le monde l’a toujours adoré, et qu’il n’aurait donc été victime que d’une poignée d’extrémistes blancs isolés au bout de l’Afrique.

    La réalité est bien différente. Pour l’essentiel de sa vie politique, Nelson Mandela a été considéré comme un homme dangereux par le monde occidental, y compris par certains des signataires des communiqués enflammés prêts dans toutes les capitales.

    La polémique autour de l’attitude de Jean-Marie Le Pen, provoquée par la réécriture de l’histoire par sa fille sur France Inter, pourrait là aussi laisser penser qu’il était seul dans ce cas. Il n’était que le plus franc, y compris quand le qualificatif de « terroriste » n’était plus de mise pour le futur prix Nobel de la paix...

    Du coté de l’apartheid

    L’histoire est pourtant cruelle. L’ensemble du monde occidental a été du côté du pouvoir blanc sud-africain pendant plusieurs décennies, jusqu’à ce que le soulèvement de la jeunesse noire, à Soweto en juin 1976, ne finisse par lézarder ce consensus, qui ne prendra véritablement fin qu’à la fin de la guerre froide, en 1989.

    La condamnation morale de l’apartheid, et même l’exclusion de l’Afrique du Sud du Commonwealth après le massacre de Sharpeville en 1960, prélude à l’emprisonnement de Nelson Mandela en 1962, aura finalement pesé moins lourd que les considérations géopolitiques. Pas surprenant, mais peut-être faut-il quand même le rappeler, au lieu de s’abriter derrière un consensus très récent.

    Dans les années 60 et 70, l’Afrique du Sud était considérée par les stratèges de l’Otan comme un pion essentiel à la fois pour le contrôle de la route maritime du Cap empruntée par les supertankers de l’époque, et comme source de certains minerais vitaux pour l’industrie de défense.

    L’appartenance à l’Otan du Portugal de la dictature Salazar, engagée dès les années 60 dans des guerres interminables dans ses colonies d’Angola et du Mozambique, renforçait cette appartenance officieuse du pouvoir minoritaire blanc de Pretoria au « front anticommuniste ».

    A Silvermine, dans la péninsule du Cap, l’armée sud-africaine avait installé dans un bunker une station d’écoute et de surveillance des mers du sud, dont les informations étaient transmises aux services de renseignement occidentaux. Les informations allaient dans les deux sens, et c’est sur un tuyau de la CIA que Nelson Mandela aurait été arrêté une première fois.

    Complicités françaises

    La France a elle aussi collaboré étroitement avec le régime de l’apartheid. Elle a vendu à l’Afrique du Sud sa première centrale nucléaire dans les années 70, au risque de contribuer à la prolifération militaire à laquelle Pretoria a officiellement mis un terme à la fin de la domination blanche.

    En 1976, alors que j’étais correspondant de l’AFP à Johannesburg, l’ambassade de France n’ayant aucun contact à Soweto et craignant de déplaire au gouvernement de Pretoria, me demandait si j’acceptais d’organiser un dîner chez moi pour qu’un émissaire du Quai d’Orsay puisse rencontrer le docteur Ntatho Motlana, représentant personnel de Winnie Mandela, l’épouse du leader emprisonné.

    Le Congrès national africain (ANC) dont les principaux dirigeants croupissaient en prison à Robben Island, était bien isolé... Dans les années 70, lorsque des délégations du mouvement de libération, conduites par son responsable international, le futur président Thabo Mbeki, passait par Paris, il habitait dans la chambre de bonnes d’un ami marocain, et était royalement ignoré par le gouvernement.

    Chirac et la « troisième voie »

    Plus tard, au début des années 80, lorsque la situation à l’intérieur de l’Afrique du Sud est devenue quasi insurrectionnelle, la droite française a participé au stratagème de Pretoria de favoriser une « troisième voie » en la personne du chef zoulou Gatsha Buthelezi, un Noir « présentable ».

    Alors que ses miliciens s’en prenaient aux partisans de l’ANC à coups de machettes, Buthelezi était officiellement reçu par Ronald Reagan et Margaret Thatcher, et, en France, par Jacques Chirac alors maire de Paris (les photos sont exposées dans le salon de Buthelezi au Kwazulu-Natal).

    Au même moment, Laurent Fabius, alors Premier ministre, imposait les premières vraies sanctions françaises et retirait l’ambassadeur de France à Pretoria.

    Il faudra la révolte des Noirs d’Afrique du Sud, la chute du mur de Berlin et un puissant mouvement d’opinion dans le monde entier, pour que les dirigeants occidentaux changent d’attitude, et poussent le régime de l’apartheid à libérer Mandela et à négocier.

    Le consensus d’aujourd’hui autour de Nelson Mandela ne doit pas faire oublier les errements criminels d’hier qui ont contribué à le laisser plus d’un quart de siècle en prison, et à prolonger la durée de vie du système inique de l’apartheid.

    Il est plus facile de faire croire qu’on a toujours été du côté du « bien » contre le « mal » que de s’interroger sur les raisonnements fallacieux qui ont poussé la « patrie des droits de l’homme » et les autres défenseurs de la démocratie à rester aussi longtemps complices d’un système basé sur un déni d’humanité.

    La disparition d’un géant de l’histoire devrait pourtant être le moment de regarder objectivement le passé.

    Publié par Patrick Haski dans Rue89